Programme ANR : La Révolution numérique : rapports au savoir et à la culture (CE38) 2018
Référence projet : ANR-18-CE38-0005
Ces dernières années, le développement des technologies numériques a donné un nouvel essor à la figure de l’amateur. Le web, d’abord avec les blogs et ensuite avec les réseaux sociaux et les plateformes collaboratives, a offert de nouveaux espaces dans lesquels le pro-amateur peut trouver un terrain ouvert et démocratique où il peut s’exprimer et obtenir une reconnaissance aux côtés de l’expert officiellement chargé de la construction de la connaissance.
Ce phénomène a touché particulièrement le domaine de la culture. Face à cette nouvelle donne, les institutions culturelles ont porté un intérêt croissant à la création de démarches participatives et au rôle qu’y pourrait jouer le numérique dans leurs activités de médiation et de valorisation. La préoccupation des institutions culturelles est, non seulement de mieux comprendre ces phénomènes de construction participative de savoirs, mais surtout d’orienter l’énergie et l’enthousiasme des amateurs vers l’enceinte des musées, archives, bibliothèques, théâtres, etc. Les plateformes contributives culturelles – tout dispositif numérique qui permet à des amateurs, ou plus généralement à des citoyens, de contribuer à la construction de savoirs liés à des objets culturels en interaction avec une ou plusieurs institutions culturelles – se sont affirmées comme une réponse à ce besoin.
Même si un certain nombre de plateformes contributives culturelles ont été lancées pour inviter les amateurs à participer à la définition des connaissances et savoirs culturels et patrimoniaux, les rapports entre institutions et amateurs qui s’instaurent à travers ces dispositifs ne sont pas toujours linéaires et transparents. Si l’institution voit le besoin d’interagir avec ces figures clés, elle a en même temps du mal à leur donner une place qui préserverait leur liberté d’expression. De même, les amateurs qui commencent leur activité en autonomie sont souvent attirés par le cadre institutionnel qui peut donner de la reconnaissance ou de la visibilité à leur action. Cependant, dans ce cadre institutionnel, ils ne sont pas toujours à l’aise.
Aujourd’hui, la recherche académique sur ce sujet, notamment en France, n’est pas encore assez développée pour apporter un support au monde associatif et institutionnel dans cette ouverture vers le citoyen. En particulier, il n’y a pas encore une expertise scientifique et technique qui permette la diffusion de plateformes numériques en tant que moyen de construction d’une approche collaborative des connaissances. En partant de ce constat, le projet COLLABORA vise à développer une réflexion théorique, empirique et politique à propos de nouvelles plateformes numériques contributives de création, documentation et valorisation des cultures et des patrimoines. Pour ce faire, la coordinatrice du projet fédérera dans une seule équipe interdisciplinaire les expertises nécessaires afin d’atteindre trois objectifs: un objectif théorique (épistémologie des plateformes) ; un objectif empirique (usages des plateformes) ; un troisième objectif politique (plateformes en action). Du point de vue théorique, en interrogeant les modèles épistémiques et politiques de ces plateformes, entre sciences participatives et pratiques amateur, ce projet a l’ambition de proposer une nouvelle approche privilégiant la relation entre amateurs et institutions et l’analyse des plateformes en tant que « cadre frontière » commun aux différents acteurs qu’y agissent. A partir de ce cadre théorique et de l’analyse des usages des plateformes existantes, ce projet prévoit comme étape ultime la co-création de recommandations et leur validation à travers la co-création d’une plateforme, en engageant dans cette démarche les principaux acteurs du projet : les institutions, les amateurs, les chercheurs et les ingénieurs.